2018 - Etre dans la panade

20 Janvier 2018 - 20:31

Photographie (Nice - 09/2011) et texte (01/2018) > Patrice Monchy

Etre dans la panade,

Ils connaissent la planque à regagner après avoir fait chou blanc au bureau de poste. Ils se sont rapidement éparpillés dans les rues avoisinantes afin d'égarer les éventuels poursuivants. Maintenant il leur faut rejoindre le repaire situé en banlieue dans un quartier ouvrier très désert. Le premier à y être entré a les pieds en compote. L'habitude de se déplacer avec une caisse n'entretient pas la marche à pieds. Pour le bon déroulement de l'affaire ils se sont réunis dans l'arrière salle d'un café fréquenté par le boss. Le tout nouveau de la bande, un briffeur, a posé un lapin. Il les avait informés de la combine. Il avait dit, c'est du gâteau et avait même donné l'horaire pour ramasser un maximum de grisbi. Tous au café ont scruté leur montre comme on surveille le lait sur le feu. A l'heure dite ils sont rentrés dans le bureau sans oublier de laisser le plus jeune faire le poireau sur le trottoir. Surprise, ce jour-là, c'est la distribution des allocs. C'est la foule des grands jours. Les guichets sont pris d'assaut. Les allocataires sont agglutinés, plutôt tassés comme des sardines.  Le caïd de la bande, celui qui se fait passer pour le patron, le visage rouge comme une tomate, essaie de se frayer un chemin dans ce mur d'humanité. En observant la situation les autres acolytes trouvent qu'il a le melon. Dans la bousculade voilà que sa ferraille chute sur le sol. Un individu avec des yeux de merlan frit se met à crier : un flingue ! un flingue ! Aussitôt le chef lui balance une prune. Affolement devant les guichets. Le type se met à hurler. Pour la bande, ça sent la fin des haricots. La moutarde leur monte au nez et dans un mouvement collectif ils se dirigent dans vers la porte de sortie en évitant d'être pris en sandwich. Au passage, un quidam se prend une châtaigne et s'écroule sur une brave dame aux cheveux poivre et sel. A l'extérieur, c'est la fuite de l'équipée…

Dans le local, les arrivées se font cahin-caha. Une fois réunis, le meneur demande aux trois associés de ne pas mettre de l'huile sur le feu et de ne pas ramener sa fraise. Tout le monde en a gros sur la patate. Ils se préparent à des moments difficiles longs comme des jours sans pain. Quant au nouveau, à l'absent, ils se demandent s'il n'a pas un petit pois dans le ciboulot. A la tombée de la nuit ils se séparent sans un radis dans les poches, sans ruminer une vengeance. Ils ne sont pas de la même veine que ceux qui envoient les briffeurs véreux manger les pissenlits par la racine.

Patrice Monchy, le 17 janvier 2018